Trois questions posées à :

Emmanuelle FERREIRA, Directrice des investissements déléguée, et

Thierry CHARON, Directeur général adjoint.

Résilience des économies occidentales, réouverture de la Chine, tensions géopolitiques croissantes entre les États-Unis et la Chine, turbulences dans le secteur bancaire : le premier trimestre 2023 a été agité. Quelles leçons en retenir pour le reste de l’année – et au-delà ? Thierry Charon, Directeur général adjoint, et Emmanuelle Ferreira, Directrice des Investissements Déléguée chez Agrica Épargne, examinent quelques pistes d’investissement et de réflexion.

 

Fin 2022, le gouvernement chinois a levé brutalement toutes les restrictions sanitaires. Quelles sont les conséquences de la réouverture de la Chine après trois ans de strictes politiques « zéro Covid » ?

T. Charon : C’est un changement majeur pour l’économie mondiale. En 2022, la croissance chinoise s’est élevée à seulement 3 %, une mauvaise performance pour ce pays qui représente 18 % du PIB mondial. Pour 2023, le pays prévoit une croissance de son PIB de 5 %, un chiffre probablement conservateur. On peut s’attendre en tout cas à ce que la consommation des ménages chinois rebondisse, fortement stimulée par les mesures gouvernementales de relance et un niveau d’épargne très élevé.

E. Ferreira : Cela constitue indéniablement une excellente nouvelle pour les entreprises européennes présentes en Chine. Le secteur du luxe, dont la clientèle chinoise constitue le principal débouché, est très bien positionné pour en bénéficier. De la même manière, le secteur technologique pourrait en profiter, notamment les semi-conducteurs. Dans l’industrie, les sociétés de biens d’équipements, comme Schneider Electric ou Siemens, sont également bien positionnées sur ce marché. Autant de secteurs que nous avons renforcés dans nos portefeuilles ces derniers mois.

 

De la Silicon Valley au Crédit Suisse en passant par la Deutsche Bank, le secteur bancaire a connu une série de secousses à la mi-mars. Que peut-on en retenir ?

E. Ferreira : Il est encore tôt pour tirer les leçons de cet épisode. Les événements récents pourraient affecter les volumes de crédit distribués par les banques et donc impacter l’économie réelle. Dans ce contexte mouvant, il convient de rester prudent sur ce secteur à ce stade.

T. Charon : Il faut tout de même souligner qu’un resserrement monétaire aussi important que celui de ces derniers mois ne peut se faire sans répercussions. Cela a naturellement joué dans les difficultés actuelles de certaines institutions bancaires.

 

Quelles sont les autres tendances majeures qui émergent, liées notamment au contexte géopolitique ?

E. Ferreira : Un découplage croissant se fait entre l’économie financière, telle qu’incarnée par les grands groupes des indices boursiers, et l’économie réelle : PME, petites banques, secteur agricole... Beaucoup sont en difficulté face à l’inflation et aux crises à répétition.

T. Charon : Par ailleurs, le risque géopolitique existe bel et bien, et entraîne un double mouvement : moins de mondialisation et plus de recherche de souveraineté, ce qui devrait se traduire par une hausse substantielle des investissements dans le secteur de la défense dans la plupart des pays. Autant de sujets qui devraient représenter des opportunités de croissance pour de nombreuses entreprises